Nature, poésie, beauté
On ne peut exister sans un jour la croiser
Car, telle une pépite au coin noir d’un rocher,
Que seul l’œil d’un chercheur aura pu déceler,
Elle brille partout, il suffit pour la voir
D’ôter de nos chemins tous reflets illusoires
Pour attraper au vol son véritable éclat
A la fois rayonnant, subtil et délicat.
Allez dans les cités, et sous un escalier,
Dans un recoin obscur très bien dissimulé,
Vous verrez un garçon, le crayon à la main,
Qui dessine en secret sur un grand calepin
Le sourire adorable de sa bien-aimée
Et la ville fleurie qu’il lui a inventée.
Un peu plus loin, assis sur le banc d’un vieux parc,
Quelque peu délabré et que nul ne remarque,
Vous pourrez entrevoir la silhouette émaciée
D’un homme aux bras couverts d’oiseaux apprivoisés
Qui viennent lui siffler des airs dignes des anges :
Comme un chant de l’éden, la chanson des mésanges
Autour de lui célèbre un hymne à la Nature,
Ce qu’il est de plus beau, de plus frais, de plus pur…
Encore un peu plus loin - sachons bien observer -
Dans une cour d’école où rôdent les dangers,
Où les jeunes font peur tant leur cœur est fermé,
Trop envahi de peine et de méchanceté,
On entend résonner la chorale appliquée,
Quand soudain se détache une voix si parfaite
Que rien qu’à l’écouter, on se sent l’âme en fête,
Et dans tous ces regards si sombres et si durs,
Elle fait s’allumer de célestes gravures,
Une image d’un monde où la douceur existe
Où l’on parle d’amour, où la tendresse incite
A l’entente amicale, à la fraternité,
Comme il arrive aussi qu’au fond d’une prison
Où le temps est si long lorsque l’on marche en rond,
Un détenu découvre au détour d’une page
Qu’on lui a dit de lire et qu’il tourne avec rage,
Un poème si beau que les larmes lui viennent
Comme une vague fraîche et légère et sereine
Emportant en son flot sa terrible rancœur,
Car les mots magiciens usent de sortilèges
Pour charmer tout esprit, et pareils à la neige
Qui transforme en miroir d’un blanc immaculé
Un paysage ingrat aux contours sans attraits,
Ils magnifient la vie, la parant de couleurs,
Répercutant l’écho d’un mystérieux Ailleurs
Où tout serait baigné d’une infinie splendeur…
Et puis, pour chaque humain, quel que soit son destin,
Sa misère ou sa joie, sa gloire ou son déclin,
Il est une richesse, un trésor d’émotions
Offert par la Nature à sa contemplation :
Ces forêts, ces pampas, ces steppes, ces glaciers,
Ces lacs, ces océans, ces déserts mordorés
Qui luisent nuit et jour dès l’aurore rosée
Ou flamboient sous le feu des couchants empourprés,
L’espèce végétale aux mille et un visages,
Et la race animale issue du fond des âges…
Tout ce foisonnement et cette luxuriance
Proliférant sans cesse en nouvelles naissances
Est un spectacle inouï, un cadeau si précieux
Qu’on le reçoit d’un cœur humblement respectueux…
Sa véritable essence et sa haute magie,
Sous la baguette d’or de leurs enchantements,
Notre conscience enfin transcende ses limites,
Son orgueil se désiste et son ego s’effrite,
Elle se fond enfin dans l’éblouissement
De ce qui fut créé pour toute Eternité
Et prêté pour un temps à notre humanité.